"Le Journal de la Décroissance".
Il y a longtemps que je passe pour un joyeux et utopique poète en prônant, avec d'autres mots, l'essentiel des idées que vous avancez sur ces pages.
J'en suis ravi.
A l'heure où les certitudes japonaises se fissurent au même rythme que leurs réacteurs nucléaires, je me sentais seul et marginal et je découvre que nous sommes des milliers (et plus j'espère) à partager une grande idée, la seule qui vaille encore la peine d'être défendue si nous voulons virer de bord avant qu'il ne soit trop tard.
En revanche, bien que moyennement cultivé, j'ai beaucoup de mal à comprendre le vocabulaire "technocratique" que vous utilisez pour synthétiser votre pensée et je crains qu'il ne soit un peu abscons pour les lecteurs potentiels qui seraient séduits par votre projet.
Sans vouloir offenser personne, je constate que la grande majorité de mes concitoyens tirent l'essentiel de leurs convictions politiques de leur « petite lucarne » et ont bien du mal à rester éveillés jusqu'à la fin des débats lorsque des empoignades stériles fusent.
En général, le match terminé, ils coupent la télé et vont se coucher ; demain est un autre jour de labeur, de fatigue et de pressions de toutes parts.
De là à conclure que leurs opinions politiques sont stéréotypées, il n'y a qu'un pas que je me garderai bien de franchir.
Plus sérieusement, je suis persuadé que des mots simples seraient plus convaincants.
Car quoi ? Que cherche-t-on si non convaincre le plus grand nombre de l'urgente nécessité de revenir à des valeurs simples et plus sages ?
J’entends et je lis ce besoin de se démarquer de toutes les autres « grandes » formations politiques y compris les Verts et je partage cette tendance.
En effet, la décroissance ne s’accommode d’aucune forme de famille politique actuellement connue et reconnue.
Les mouvements écologistes eux-mêmes n’excluent pas la croissance et le P.I.B. de leurs concepts alors que ces deux idées sont aux antipodes de mes valeurs.
Je pense qu’il faut rester fermement sur cette position et ne pas rechercher de partenariat qui nous mèneraient immanquablement à des compromissions.
Décroître ce n'est pas revenir en arrière et s'éclairer à la bougie bien que cela fasse partie d'un arsenal de mesures propres à sortir du nucléaire.
Décroître c'est choisir le mode de vie qui tende vers le zéro notre bilan carbone.
Ça passe par limiter nos déplacements au minimum, limiter nos déchets et recycler au maximum ou composter pour ne garder que nos déchets ultimes qu'il faudra décroître également.
Décroître c'est allonger la durée de vie de tous les objets qui nous entourent et qui, pour beaucoup, sont inutiles.
Réparer une serrure au lieu de la changer, poser une rustine sur une chambre à air de bicyclette, changer un clapet de robinet, recoller le pied du vieux meuble que nos parents tenaient de leurs parents, etc.
Mais alors, … ces serrures, ces robinets, ces meubles, il faudra bien des industriels pour les fabriquer, en améliorer leur usage, en inventer de meilleurs ?
Oui mais juste ce qui est nécessaire.
À bas l'obsolescence programmée !
Halte au gaspillage !
Nos sociétés « modernes » jettent outrageusement.
Les responsables politiques, soucieux de conserver la place qu'ils ont tant convoitée, s'alignent derrière les industriels dont le seul objectif est de produire toujours plus et derrière les banques dont le seul souci est de remplir leurs coffres.
Ils se font le levier de la croissance de ces derniers en incitant le consommateur à se débarrasser de ce qui fonctionne encore très bien.
Pour ce faire ils ont inventé la « prime à la casse » !
Payer les contribuables pour gaspiller davantage !
Aujourd'hui, en France, un citoyen qui consomme vaut mieux qu'un citoyen qui produit.
Décroître c'est vivre le plus possible en autonomie : produire soi-même une partie de ses aliments, produire soi-même son énergie et la partager avec ses voisins là où c'est possible.
Le commerce de proximité n'est pas un « gros mot » tant qu'il reste équitable.
Je connais une multitude de sites naturels où des installations hydrauliques ont été abandonnées après la dernière guerre (j'espère) alors qu'elles faisaient tourner scieries, papeteries et moulins de toutes sortes.
Combien de hameaux se satisferaient de cette manne issue de nos petites rivières.
L'énergie éolienne revient lentement à la mode mais à trop grande échelle.
Là aussi des petits groupes d'habitations rurales pourraient produire leur propre énergie.
Je souhaite revoir tourner bientôt le moulin de Maître Cornille cher à Alphonse Daudet.
Décroître c'est mutualiser les moyens de production jusque dans les quartiers, les hameaux.
Décroître c'est aussi renoncer aux valeurs de l'argent, du capitalisme, du profit.
Cela suppose une organisation de vie en forme de coopérative afin de limiter les déplacements donc économiser l'énergie donc rejeter le moins possible de CO2 dans l'atmosphère.
Décroître c'est se ressaisir, c'est ne plus écouter les sirènes pub, c'est chercher une autre forme de bonheur, de bien-être, c'est partager, c'est prendre soin de son prochain comme de soi-même.
Ces valeurs sont à l'opposé de celles du capitalisme.
Cependant je ne prône pas le repli sur soi-même.
Nous dépendons tous des uns des autres.
Les « richesses » créées par les pays les plus développés n'ont profité qu'à ces pays et, surtout, à ses habitants les plus voraces.
Il est communément admis que seul un terrien sur dix possède 90 % des richesses du monde.
Tant que ce déséquilibre perdurera, les conflits se multiplieront surtout dans les pays les plus désavantagés.
Le partage des richesses suppose le partage des savoirs.
Je place l'instruction et l'accès à la culture au premier rang des urgences du monde.
Décroître ne veut pas dire « régresser ».
Les acquis culturels, technologiques, médicaux que nous connaissons doivent profiter au plus grand nombre et cela gratuitement.
C'est en « instruisant » tous les terriens jusque dans les contrées les plus reculées que nous ferons reculer la faim, la misère et la délinquance.
La France est un pays phare dans le monde.
La géographie et le climat y sont pour beaucoup.
Notre culture et notre langue influence bon nombre de pays.
Cela nous impose une responsabilité, un devoir : donner l'exemple.
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