Anne marie ma grande soeur

 

Chère grande sœur, je vais un peu mieux après six jours de fièvre, de toux et de grippe mais tu ne m'as pas laissé le temps de t'en informer tant la virulence de ta contre-attaque préventive m'a surpris avant même que j'ai eu le temps de me retourner dans mon lit.

Je n'avais nullement l'intention de polémiquer et encore moins de te contrarier avec mes idées "farfelues".

Je dois te dire que tu m'as blessé : je venais vers toi avec l'espoir de trouver une parole apaisante aux antipodes des turpitudes politico-économiques du moment. Tu m'as entraîné sur un terrain que je n'avais pas prévu d'aborder et, comme souvent, ton esprit rapide a eu tôt fait de me jeter au tapis.

En composant ton numéro, c'était à ma grande sœur de notre enfance auprès de qui je venais chercher un peu de tendresse, celle avec qui j'ai partagé mes petits secrets, mes états d'âme et mes crises d'asthme dans l'intimité de notre chambre isolée. Cette sœur là me secouait un peu les puces mais j'avais pour elle une telle admiration et un tel amour que je l'aurais suivie au bout du monde. Puis "notre" petite Frédi, ton premier bébé, est arrivée et la vie a fait le reste. Mais quand je pense à toi, c'est toujours ton image de cette époque qui me revient à l'esprit. Décidément tu n'as pas vieilli.

Voilà, il fallait que je te dise tout ça pour que tu comprennes ce que tu représentes pour moi et comme je n'aurais pas pu te le dire de vive voix sans être interrompu (ou sans que tu descelles quelques sanglots dans ma voix), j'ai choisi cet écran bien plus efficace que des lunettes noires.

A plus chère grande sœur bien aimée.

 

 

Annie nous a quittés le 14 juillet.

Je n'avais jamais ressenti autant de chagrin de toute ma vie.