Je dors mal, et vous ?

 

Samedi 20 novembre 2021


Je dors mal.

Hier une horde de jeunes réfugiés avaient squatté mon Gandalet.

Ils avaient tout sorti des quatre abris : le cabanon haut et bas, les deux garages Est et Ouest.

Les vieux meubles désossés, les tables et chaises, les outils, les fouillis, tout dehors ! Et tout ce petit monde chantait, dansait et buvait.

Cette nuit c'est la pleine lune ou la nuit trop claire ou le climat trop doux pour la saison qui ont agité mon sommeil.

Tout ce trop beau, trop calme, trop clair ne me dit rien qui vaille et m'angoisse.

C'est comme un appel à se lever le cul, reprendre cette aventure là où je l'avais abandonnée alors que tout allait bien.

Manu n'attendait plus que les murs soient doublés pour terminer l’installation électrique et mon paradis devenait habitable.

Mais un maire tatillon est venu mettre un coup d'arrêt à tout ça : STOP !

Décret, gendarmes, humiliations, tribunal, amende, il n'en fallait pas plus pour me mettre au tapis.

Alors les douleurs ont repris le dessus.

À croire qu'elles se réveillent pour combler un vide.

Papa est mort le six juin 2015 mais le vide est ailleurs … … … ou non.

Je ne sais plus ce que je dois faire. Vendre ? 

Tout abandonner et me contenter de ce petit studio à 300 euro par mois dans le village ? 

Huit ans déjà que j'y habite paresseusement.

Même si les chiottes prennent l'eau par temps de pluie, même si la cave produit 100 litres d'eau déminéralisée par mois, je reste.

Encore deux ans et j'aurai dépensé 36000 euros, de quoi m'acheter l'équivalent.

Quel gâchis !

Mais tout cela n'est rien en regard du fossé qui me sépare des mes enfants, de ma famille, de mes frères et sœurs. 

Juliette est rentrée à la maternelle et je n'en ai plus eu de nouvelles. 

Cassandre va suivre le même chemin sans que je vive ces instants pourtant si beaux.

Voilà ce qui me tient debout : ne pas penser au lendemain sinon je m’effondre.

Je suis désorganisé. Ma mémoire s 'évapore de jours en jours. 

Je me lève fatigué, lourd et engourdi de tout mon corps. 

Le peu d'énergie que je rassemble est consacrée à des tâches ménagères qui me prennent des heures et des heures.


Vendredi 31 décembre 2021


Je viens de relire ce texte vieux d'un peu plus d'un mois et mon état ne s'est pas amélioré.

Réveillon devant mon ordinateur, classement de papiers toute la journée avec un torticolis bilatéral.

Benoît m'a rappelé ce matin pour confirmer ma présence demain au milieu de ma tribu car, oui, ce qui a changé c'est ma visite à (voilà, je ne m'en souviens plu) à leur table où j'ai pu enfin mettre à jour les images que j'avais depuis plus d'un ans de mes petites-filles.

Elles sont superbes, mignonnes, un peu farouches avec ce Papé qui vit comme un ours dans sa montagne mais tellement vivantes, pleine d'espérance malgré les jours difficiles que nous traversons. 

Et dire que leur avenir dépend directement de ce que nous allons faire dès demain !

Le « corrona virus » fête ses deux ans. 

Il change de noms, de variants, de dangerosité, de contagiosité, de territoires de prédilection mais il est toujours là, présent dans tous les esprits avec la complicité « bienveillante » des puissants de ce monde qui attisent la peur par les décisions hasardeuses qu'ils déploient pour éradiquer cet hôte invisible.

Alors je prie (ho, j'entends vos sarcasmes : chut, Pierre prie) pour que des décisions plus « raisonnables » soient prises rapidement : Vacciner tous les terriens gratuitement, fabriquer en urgence des millions de purificateurs d'air et les disposer dans les lieux sensibles : classes d'écoles, hôpitaux, partout où la concentration d'humains est inévitable.

Je crois savoir que l'air passant au milieu de rayons UV et de charbon actif se « débarrasserait » du virus à 99%. 

Il suffirait que les indications des scientifiques soit entendues et suivies par tous les gouvernants de la Terre de façon concomitante pour sortir de ce cauchemar.

Mais non. Le mal est fait. 

La fin de l’anthropocène est annoncée sans que quiconque n'en dévie la trajectoire, trop occupés que nous sommes à nous gaver des derniers « trésors » que notre planète nous offre.

Je n'ose imaginer le monde dans lequel vivront Juliette et Cassandre. Pauvres enfants !

Saurez-vous, et là je m'adresse à mes enfants, réparer les montagnes de conneries que nous, les « baby-boomeurs » avons amassées au cours de notre insouciante existence ?

Je crains que non. Hélas je suis même persuadé du contraire. La tâche est inhumaine. 

Seul Dieu ou un être surnaturel et providentiel pourrait renverser la vapeur. 

Superman peut-être ?

Ou le Père Noël ? 

Alors je prie. …