Mon ancien copain

 

Mon cher Jean-Claude, une fois de plus je ne devine pas tes intentions : pour moi, "chercher l'erreur" est une devinette humoristique, légère et sans importance.

J'aurais apprécié qu'il en fût de même pour toi. 

Hors derrière le ton anodin de ta "devinette" se cache (me semble-t-il) l'exaspération de voir des Maliens "glander"  en France pendant que nos braves Soldats Français se font casser la gueule au Mali. 

C'est, en tout cas, ce que suggère la juxtaposition des deux images qui, elles, ne sont pas anodines.

Elles sont même perverses et manipulatrices.

Je m'explique :    Le lecteur lambda qui survolera ces images sans les analyser sera conforté dans son idée "qu'il y a trop de noirs en France et qu'ils feraient mieux de retourner chez eux pour défendre leur pays au lieu de compter sur nos compatriotes pour se battre à leur place". 

Mais se battre contre qui ?, contre quoi ?

Contre les djihadistes qui essaient de coloniser à leur tour l'ensemble de l'Afrique ?

Ou contre les néocolonialistes qui continuent d'exploiter à bas coût les indigènes pour amasser encore plus de bénéfices sur l'huile d'arachides, le café et le chocolat ?

Non Jean-Claude, ces blagounettes ne me font pas sourire. 

Ces jeunes noirs ont quitté leurs familles, leur terre, leur pays car ils en ont marre d'être piétinés depuis des siècles. 

Ils viennent chercher chez nous les miettes qu'on veut bien leur jeter. 

Ils n'ont pas l'intention de crever pour des cacahuètes (principale richesse de leur pays). 

En revanche nos jeunes soldats (tous professionnels) feraient bien de réfléchir avant de tirer sur qui que ce soit dans ces pays que la France "protège". 

Eux aussi risquent leur peau pour des cacahuètes. 

À la différence des noirs, eux, sont beaucoup mieux payés, ce qui réduit un peu la marge de bénéfices qu'on refile aux actionnaires des grands groupes agro-alimentaires qui, eux, ne risquent rien.

Voilà pourquoi, mon cher Jean-Claude, la plupart de tes blagounettes tirées de "Minute", "Le Figaro", "Nice-matin" et tous ces torchons de droite me répugnent et me révoltent.

Ce qui m'attriste et m'inquiète le plus est de constater que des millions de lecteurs survolent inconsciemment ces pages avec désinvolture et que le but de leurs auteurs est atteint : imprimer leur cerveau sans qu'ils s'en aperçoivent.

À+

 

 

Dimanche 12 février 2023

 

J'ai peut-être sur-réagi sous le coup de la colère à la nième plaisanterie de mon ancien ami JC mais, sous couvert de l'humour, les idées les plus dévastatrices germent dans des cerveaux spongieux.

Celui de JC, ancien adjudant-chef en retraite fait partie de cette catégorie.

Grand et bel homme, élégant et charmant, il ose tout.

Il ne "fait pas de politique" mais prend volontiers des initiatives en cas de carence d'un poste de commandement.

Cette situation s'est présentée au moins une fois.

Elle l'a promu au rang de maire de son petit village alors qu'il était "simple" conseiller et que personne d'autre dans l'équipe ne se décidait à prendre la suite du maire fraîchement décédé.

La gauche, la droite, le centre lui importait peu.

Lui saurait conduire le destin de ses concitoyens sans faillir.

L'essentiel sera qu'il soit d'accord avec le dernier qui a parlé surtout si c'est un personnage de pouvoir.

À l'issue de son mandat de courtoisie, il arborait fièrement les "avancées" de son village sans entendre les éloges hypocrites chuchotées dans son dos.

Plus tard le hasard nous fit nous rencontrer et, malgré mon penchant à gauche, nous devînmes copains.

Ses incertitudes m'amusaient et je le taquinais sournoisement sans toutefois le contredire de front.

Avait-il compris mes réelles opinions ou faisait-il semblant de les ignorer, il m'aimait bien et ne dédaignait pas me piquer de temps à autres à propos de l'actualité pour savoir de quel côté je penchais.

Selon mes réponses la plupart évasives, il changeait de conversation pour aborder ses thèmes préférés : les femmes, la sienne en deux mots mais surtout celles qui ont dansé dans ses bras, sa vie militaire et sa mairie dont il n'était pas peu fier.

Je découvris peu à peu que son manque d'assurance le faisait rêver réveillé sur la gente féminine, qu'il avait eu la chance d'avoir fait carrière au ministère à Paris plus quelques affectations dans des ambassades d'Europe et d'Afrique ce qui lui assure encore une retraite plus que confortable, quant à "sa" mairie, il semble être le seul à en tirer un bilan positif mais peu de gens osent le contre-dire.

En somme sa haute taille, son allure élégante et sa bonne santé aurait dû ou aurait pu le propulser vers un avenir brillant mais le destin en avait décidé autrement.

J'ai un peu hésiter avant de vous livrer cette tranche de vie mais je sais avec l'expérience que nombre d'entre nous avons connu ce genre de déception et, après tout, ce texte n'est qu'un témoignage.