Je me brosse les dents

Aujourd'hui je veux vous faire partager ma dernière invention : le brossage des dents. 

Vous avez sans doute entendu comme moi que les dentifrices contenaient des métaux et autres produits nocifs pour la santé. 

Les médias ne cessent de nous alerter sur les dangers liés aux produits inutiles et chers. 

Donc je me suis posé la question : à quoi sert le dentifrice ? 

Réponse : peut-être à maintenir en suspension dans la bouche les particules de nourriture que les poils de ma brosse à dents ont réussi à extirper de leur cachette en attendant le crachat répulsif qui les enverra au fond du lavabo. 

La mousse provoquée par l'agitation des poils sur l'ensemble eau-dentifrice fait que les détritus reviennent plus difficilement à l'endroit d'où ils ont été délogés. 

Mais alors si c'est là la seule mission du dentifrice, ne pourrions-nous pas nous en passer ? 

Le risque d'une intoxication à l'aluminium n'est-il pas supérieur à l'avantage bien relatif d'un brossage dont l'efficacité reste à prouver ? 

C'est décidé, je ne mets plus de dentifrice sur ma brosse à dents. 

En revanche j'ai opté pour une méthode de brossage dont l'efficacité est remarquable : les turbulences que font le bout des poils de ma brosse à dent en milieu aquatique sont mille fois supérieures aux mêmes turbulences en milieu aérien. 

Si si, faites l'expérience : remuez une fourchette dans un bol vide. Rien ne se passe et pour cause : l'air que traverse les dents de la fourchette dans cette danse ridicule est si peu dense que les tourbillons qu'il engendre ne ferait même pas frémir une aile de papillon. 

En revanche la même frénésie dans le même bol rempli d'eau provoque une tempête dont aucun être vivant ne sortirait indemne toutes proportions gardées. 

Et il s'agit là de quatre dents ... de fourchette. 

Considérant que les poils de ma brosse à dents sont au nombre de mille soit deux cent cinquante fois plus nombreux que dans votre bol, je vous laisse imaginer les cyclones ravageurs qui frapperaient la falaise de votre cavité buccale à chaque tempête poste alimentaire si vous suiviez ma méthode. 

Si je me brosse en me regardant dans la glace ou en me promenant dans ma salle de bains pendant des minutes et des minutes je constate que seule la salive alliée à la brosse parvient à déloger quelques résidus culinaires de mon râtelier et c'est normal puisque la salive se concentre au bas de ma bouche et ne touche de ce fait que les dents de la mâchoire inférieure et encore ... 

Par conséquent ce que je vous propose consiste tout simplement à remplir votre bouche du maximum d'eau et d'introduire la brosse dans la bouche sans perdre trop de liquide. 

Puis, tête baissée au dessus du lavabo, brosser en tous sens comme vous le faisiez auparavant en ne lâchant qu'un minimum d'eau par la commissure des lèvres autour du manche de votre brosse à dents. 

Les mille et un poils entrent en action par petits groupes au fur et à mesure de leurs passages sur chaque aspérité rencontrée et déclenchent des myriades de petits cyclones suivis de myriades de tsunamis qui débarrassent tout sur leur passage laissant gencives et dents d'une propreté absolue. 

Vous constaterez l'efficacité de ma méthode à la quantité incroyable de détritus de toute origine sortant au fil des fuites inévitables dues aux changements d'orientation de la brosse. 

Si vous souhaitez tenir une comptabilité plus précise des reliefs du repas que vous venez de prendre je vous conseille de fermer la bonde. 

La différence d'analyse est frappante entre une purée andouillette et un bœuf bourguignon dont les fibres récalcitrantes sont délogées sans ménagement au même titre que ses voisins les morceaux de cacahuètes grillées. 

J'ai poussé l'expérience en me brossant les dents comme je le faisais jusque là c'est à dire consciencieusement et avec du dentifrice. 

Puis j'ai recommencé l'opération selon ma nouvelle invention comme si j'avais oublié de le faire : hé bien c'est comme si j'avais oublié de le faire. 

C'est incroyable la ruse déployée par ces petites cochonneries pour rester au chaud !


Le naturisme

Le nudisme NON, le naturisme OUI. 

La principale barrière au naturisme c'est notre culture. 

Que nous le voulions où non nous sommes pétris de principes, d'atavismes, de rituels qui nous collent aux basques et nous empêchent d'évoluer librement. 

Il faut savoir parfois ruer dans les brancards, se débarrasser des valeurs que nous ont transmises nos parents, nos proches, notre entourage, notre civilisation. 

Pas facile car, inconsciemment nous nous sommes approprié ces principes, nous en avons fait une partie de nous-mêmes. 

Cette opération s'apparente à un changement de pot pour la plante.

Après avoir germé puis grandi sans choisir notre provenance, le moment est venu de choisir un nouvel environnement. 

Soit nous optons pour un pot plus grand où nos racines pourront se développer mais nous adoptons alors le même mode de vie, soit nous choisissons de nous replanter en pleine terre avec tous les risques d'un environnement naturel donc menaçant. 

Le bégonia que l'on soigne tout au long de l'année, que l'on rentre à l’abri aux premiers frimas, qu'on arrose régulièrement, a toutes les chances de refleurir au printemps. 

L'autre, celui que nous aurons replanté en pleine nature, devra affronter pucerons, grêle, froid et animaux de toutes sortes, bref, le danger. 

Être nus en pleine nature nous demande de remonter à des temps très anciens où les premiers hommes n'avaient pas encore de vêtements. 

Autrement dit, le naturisme que certains conçoivent comme un grand pas en avant serait lié, au contraire, au besoin de revenir à un état primitif. 

L'obstacle réside donc dans cette dichotomie : vivre dans un état exceptionnel parmi nos semblables ; être à la fois dans un temps que nous choisissons et dans l'autre que nous ne maîtrisons pas. 

D'autres éléments viennent s'ajouter à cet obstacle : l'apparence. 

Les premiers hommes vivaient nus et ne se souciaient guère de leur physique. 

Il est vrai qu'ils étaient vieux à quarante ans quand les éléments le leurs permettaient donc la vieillesse était relative. 

Pour nous l'apparence a plus de chances d'évoluer tout au long de notre longue vie. 

Cette dernière ne nous épargne pas les abus de toutes sortes et même si nous menions une vie d’ascète, les rides, la peau flasque, les bourrelets ne manqueraient pas de nous accompagner jusqu'à notre dernier souffle. 

Dans une société où le paraître tient une place non négligeable il devient difficile de faire abstraction de son physique. 

Là aussi le regard de l'autre décide de notre attitude. 

Soit je me rhabille et je rentre dans le moule de la société bien pensante, soit j'assume et me fous des regards obliques. 

Il reste que nous ne sommes pas tous égaux, dans ce domaine comme dans bien d'autres, et là où le naturisme est à contre-courant des conventions, le vêtement pour quelques peuples primitifs de notre planète n'est qu'un artifice qu'ils arborent en riant car il est surtout l'apanage des visiteurs de passage. 

La "civilisation" les a épargné. 

Pour ces gens-là le mot naturisme est vide de sens. 

Ils font encore partie de cette nature vierge (hélas pas pour longtemps) ou le vêtement est un déguisement propre à singer le voyageur venu "d'un autre monde". 

Pour moi le naturisme est un art de vivre le plus près possible de la nature, en accord avec mon moi profond, en assumant ma silhouette ventripotente, en respectant l'autre et sa pudeur mais en lui demandant de respecter aussi mes goûts. 

La nudité ne devrait pas choquer. 

Elle a le mérite de dire la vérité. 

Le vêtement triche. 

C'est lui le message. 

Respect mutuel et tolérance devraient être les maîtres mots de cette philosophie.


Dieu

Selon moi, Dieu c’est un peu comme le Père Noël ou la fée Clochette. 

N’y voyez surtout aucune provocation de ma part ; je vous dis seulement ma façon de penser. 

Je m’explique : La nature humaine a toujours cherché des réponses à ses questionnements et ce, depuis la nuit des temps ou, au moins, quelques dix millions d’années. 

Notre cerveau s’est développé et certaines questions ont trouvé des réponses soit par l’observation scientifique, soit par le raisonnement philosophique. 

Depuis les derniers millénaires ( trois ou quatre ), le processus s’accélère, les civilisations s’organisent et les « Dieux » remplacent peu à peu les points d’interrogations. 

Depuis ces derniers siècles ( trois ou quatre ) cette accélération devient galopante. 

Les philosophes se servent des découvertes des scientifiques pour proposer des réponses nouvelles. 

On assiste, depuis peu, à un feu d’artifice de connaissances qui entraînent d’autres connaissances de plus en plus affinées et ce, au détriment des « croyances ». 

On fissure l’atome puis on le fusionne ; on marche sur la Lune puis on « visite » Mars ; on observe de plus en plus loin et l’on va vers l’infiniment petit ; on compare les gènes, on clone les brebis, bref, la brume se dissipe. 

Là où l’on ne voyait pas, on discerne peu à peu. 

Toute proportion gardée, c’est un peu comme si l’humanité quittait la maternelle pour rentrer au cours préparatoire : elle doute. 

Elle se pose des questions sur la grosseur du ventre du Père Noël et le diamètre du tuyau de la cheminée ; elle commence à vérifier si les traces dans la neige sont bien celles de l’attelage de rennes. 

Elle s’accroche cette humanité, elle voudrait tellement y croire : « Dieu est si bon ! » 

Alors je l’observe et je suis attendri.